Ski Mojo

Introduction

Lorsqu’on m’a proposé de tester le Ski-Mojo, un exosquelette qui promet de réduire la fatigue musculaire et soulager les douleurs aux genoux, j’ai d’abord pensé qu’à quarante ans et des poussières, j’étais encore loin de l’âge légal pour avoir recours à de tels artifices pour prendre mon pied en skiant... Et puis bon, qui ne tente rien ... la curiosité a été plus forte. Le Ski-Mojo allait-il être l’arme ultime pour ne pas me faire distancer par les potes plus jeunes ou plus entrainés ?

Fonctionnement

Le Ski-Mojo a été inventé il y a une douzaine d’années par Owen Eastwood, citoyen britannique qui a commencé le ski à la cinquantaine passée et a cherché un moyen de rendre l’activité plus accessible physiquement. L’appareil a ensuite été largement redesigné par Martin Hannaford avant son lancement commercial en 2007, couronné par un ISPO Award en 2008 (récompense décernée aux produits les plus innovants et prometteurs lors du salon professionnel des sports d’hiver de Munich).

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Le principe du Ski-Mojo est d’utiliser un ressort pour soulager muscles et articulations en prenant en charge environ le tiers du poids de votre corps. On peut facilement imaginer le bénéfice pour des genoux usés (arthrose, décalcification, inflammation) d’un « régime express » qui vous ferait passer de 80 à moins de 60 kg et limiterait donc les efforts sur l’articulation... Mais le Ski-Mojo ne veut pas limiter son champ d’action aux skieurs « mous du genou » puisque pour les sujets sains, la promesse peut aussi se traduire de la façon suivante : 33 % de puissance musculaire supplémentaires sans passer par la case préparation physique ! C’est probablement encore un peu juste pour mettre Svindal à l’amende, mais pour les potes ça devrait suffire...

L’exosquelette est composé d’une partie souple, en néoprène essentiellement, chargée de maintenir en place le quadriceps bionique, la tige amortisseur articulée et réglable en compression qui elle, se positionne sur l’extérieur de la jambe en se clipsant à l’arrière de votre chaussure de ski via un connecteur. Le Ski-Mojo n’est pas un dispositif « Plug and Play ». Si l’appareil existe en deux tailles (ou plus exactement deux tarages de ressort, pour s’adapter à différentes plages de poids d’utilisateurs), il reste ensuite pas mal de réglages à effectuer pour l’adapter à votre morphologie (réglage de la longueur de la tige en fonction de la longueur du fémur et du tibia essentiellement) et surtout, parvenir à le positionner correctement sur votre jambe. Le bon positionnement du connecteur sur la chaussure est par exemple primordial : trop à l’intérieur et la puissance du ressort va faire partir vos pieds en canard, ce qui n’est pas l’idéal pour skier, à moins peut-être de vouloir concurrencer Rancho en skating sur La Transjurassienne… L'aide d'un spécialiste qui connaît les régalages sera donc une très bonne aide dans un premier temps.

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Il existe un connecteur spécifique pour tester l’appareil (qui vient pincer la partie arrière de votre chaussure sans l’abîmer) qui peut ensuite être remplacé par un connecteur fixe beaucoup plus discret, qui nécessitera juste de faire un petit trou dans vos souliers. Le réglage de la puissance du ressort se fait en fonction du poids mais aussi de la tonicité musculaire, du niveau technique de chacun et des éventuelles douleurs à soulager : il suffit alors de précontraindre le ressort du nombre de tours donné par le tableau d’équivalence. Facile.

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Avant même de chausser les skis, en « test moquette », on ressent immédiatement l’assistance dans la phase de flexion (compression) et surtout d’extension (détente). Une petite gâchette permet de désactiver le système pour conduire, marcher, prendre le télésiège ou boire un café en terrasse sans passer pour un kangourou perdu.

Le test du Ski-Mojo

J'active le système et on prend la même piste que nous avons emprunté toute la matinée pour tester des skis. Et là, il n’y a pas photo, la puissance sur la carre est supérieure : on prend plus d’angle, on passe plus vite en courbe, bref, c’est beaucoup plus fun, un peu comme si on avait échangé une paire de skis un peu fatigués contre des « piste race » tout neufs. Il faut d’ailleurs faire attention à ne pas trop s’enflammer car ces nouvelles jambes montées sur ressorts peuvent perturber un peu dans la gestion des ruptures de pentes et des sauts. Il faut penser à anticiper un peu plus sur les avalements sous peine de se faire satelliser. La quasi-absence de fatigue musculaire permet également de s’envoyer la piste d’une traite, même si votre capacité cardio vous rappelle à la raison, les poumons bioniques n’étant pas encore disponibles en option… C’est vraiment bluffant et on comprend mieux pourquoi c’est interdit en compétition (même si ce serait quand même bien tentant de s’inscrire à une Flèche ESF juste pour aller taquiner l’ouvreur qui aura enfilé sa jolie combinaison moulante pour l’occasion).

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Convaincu par l'intérêt du système, et ayant envie de pousser plus loin le test, on chausse les skis de slalom FIS Blizzard (un truc super doux .. comme vous pouvez vous en douter), et on monte au 2e tronçon de la Solire Express. Le temps de cette montée, je discute avec Garbiel qui m'a installé le système et je lui demande si il n'y a pas un risque d'y prendre gout et de perdre en musculature des jambes. Il n'a pas l'air inquiet ;)

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Arrivé en haut, on enclenche le système et c'est parti pour une série de petits virages et mode slalom face à la pente tout droit dans le mur bien glacé. Il me faut quelques virages pour m'habituer à mes nouvelles jambes bioniques, et retrouver le placement sur les skis de slalom, mais assez vite, les effets de ce dopage mécanique me permettent, comme avec les skis 'classiques' de mettre plus d'angle, de venir plus facilement devant, de mettre plus d'intensité dans le ski. Il faut dire que vu l'état de la neige, des bonnes carres et du punch ne sont pas de trop pour éviter les plus belles figures de "Holiday on Ice". Après une 30 aines de virage (l'équivalent d'un petit slalom dans les piquets), je commence à bien souffler mais les jambes sont toujours là ... alors on continue ! A la fin du premier tronçon, toujours pas de brulure dans les gambettes ... tiens, là, on est pas mal ... alors on ne s'arrête pas là, et on enchaine jusqu'en bas, pour finir par le stade de slalom de Mottaret qui est préparé aux petits oignons. C'est l'occasion de mettre de l'angle au point d'avoir la main intérieur dans la neige à chaque virage ... un pur bonheur. Et hop, on est en bas. Cette fois, les jambes fument et brûlent, je souffle comme un boeuf, mais qu'est ce que c'était bon ! J'ai la réponse à ma question : on ne perdra pas en musculature avec le Ski Mojo ! Par contre, on va skier beaucoup plus !!

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Je pensais au départ ne faire qu'une piste en mode Steeve Austin, mais Gabriel acceptant de me laisser mon nouveau joujou, je décide de ne pas désactiver mon assistance mécanique pendant quelques pistes supplémentaires. A l'occasion d'une erreur d'aiguillage, je me retrouve à l'autre bout de la station, avec un super long shuss pour rentrer à la base. Même pas mal ! 3 bonnes minutes de shuss en position de recherche de vitesse sans avoir les jambes en compote .. incroyable. Je ne parle pas de la sensation très agréable d'être sur un tapis volant à chaque mouvement de terrain.

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De retour au stand, on désactive le Mojo et d'un coup, on a l'impression d'avoir chargé un sac de sable de 30kg sur le dos. Ca fait un peu peur, et pour vérifier, on se refait une piste sans activer le dispositif. Il faut quelques virage pour se ré-habituer ... c'est bon , on sait encore skier sans assistance .. ouf ! Mais bon, ma dose d'anabolisant mécanique me manque, alors je fini ma journée de test en re-enclenchant le système.

Conclusion

En résumé, le Ski-Mojo est une sorte de dopage mécanique qui présente bien des avantages pour un grand nombre de skieurs. On peut lui reprocher de gommer quelques sensations mais on s’habitue assez vite, et rien n’empêche de régler le ressort encore moins fort pour trouver le juste milieu entre puissance et feeling. Pour ceux qui ont mal aux articulations, il est assez logique d’imaginer les avantages du système. L’aspect préventif semble également intéressant : beaucoup de rupture du ligament croisé intervenant à cause d’une contraction trop violente des quadriceps lors d’un déséquilibre arrière (ça a été mon cas il y a 5 ans). Le Ski-Mojo, qui était au début plutôt utilisé par des moniteurs, guides ou pisteurs, commence à élargir son public avec un bouche à oreille très positif venant de ceux qui ont pu continuer à skier ou se remettre au ski alors qu’ils étaient proches d’abandonner leur sport favori... On raconte même que certains en auraient pleuré de joie !

Pour qui ?

A priori, tout le monde. Un petit niveau technique est tout de même nécessaire puisque le Ski-Mojo a été conçu pour skier en appui languette, donc en conduite coupée. Si vous skiez droit comme un piquet et que vous vous contentez de virer de bord à grands coups de rotations du buste, gardez votre argent pour prendre des cours de ski… Les moins de 35 ans, forts skieurs et en pleine forme sont également priés de s’abstenir, ce serait de la concurrence déloyale... Pour tous les autres, la balle est dans votre camp !
Les plus :
  • La puissance
  • Permet d’amortir le forfait (moins de fatigue = plus de runs)
  • Mieux vaut prévenir que guérir (soulage donc préserve les articulations)
  • Pas gênant à porter et manipulation très facile (actionnement / débrayage)
  • Discret si porté sous le pantalon
Les moins :
  • Petite perte de sensations qui peut gêner les bons techniciens
  • Descend un peu sur les jambes en position marche
  • Êtes-vous prêt à assumer ?

Combien ça coûte ?

590 euros, soit environ le prix d’une nouvelle paire de skis ou d’un abonnement annuel au club de gym. En tout cas, c’est bien moins cher qu’une nouvelle paire de genoux !

Des témoignages

dans Ski
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